Qui est Georges Ibrahim Abdallah, un des plus anciens détenus de France, qui va être libéré?

Des policiers escortent le militant libanais pro-palestinien Georges Ibrahim Abdallah (c) à sa sortie du palais de justice de Pau, le 18 février 2010 - JEAN LOUIS DUZERT © 2019 AFP
Avec plus de quarante ans de prison à son actif, il est l'un des plus anciens détenus de France. Condamné en 1987 à la réclusion criminelle à perpétuité, Georges Ibrahim Abdallah a depuis fait 10 demandes de remise en liberté, toutes rejetées. Finalement la chambre d’application des peines de la cour d’appel de Paris a accepté ce jeudi 17 juillet la libération du détenu libanais.
"J'ai dit aux juges 'soit vous le libérez, soit vous le condamnez à mort'", avait lancé à la presse Me Jean-Louis Chalanset, son avocat, en sortie d'audience le 19 juin dernier.
Condamné à la perpétuité en 1987
Ce Libanais, soupçonné d'être le responsable en Europe des Fractions armées révolutionnaires libanaises (FARL), un groupuscule de chrétiens libanais marxistes pro-palestiniens, est arrêté à Lyon en octobre 1984 et placé en détention provisoire.
On le soupçonne alors d'être complice des assassinats de deux diplomates, l'Américain Charles Robert Ray et l'Israélien Yacov Barsimantov, tués en 1982 à Paris. En 1985, des armes et des explosifs sont d'ailleurs découverts dans un appartement qu'il loue, dont un pistolet qui a servi au double meurtre.
Jugé une première fois en 1986 pour associations de malfaiteurs", "détention d'armes et d'explosifs" et "usage de faux documents", l'homme est d'abord condamné à quatre ans de détention. L'année d'après, lors de son procès pour complicité d'assassinats, il écope cette fois-ci de la réclusion criminelle à perpétuité, alors que le parquet avait requis à son encontre une peine "qui ne soit pas supérieure à 10 ans".
Sa condamnation intervient dans un contexte particulier, alors que la France est secouée par une vague d'attentats mortels.
Une durée d'emprisonnement "disproportionnée"
À partir de 1999, date à laquelle il est en droit de demander sa libération, Georges Ibrahim Abdallah multiplie les requêtes. Toutes sont rejetées... à l'exception d'une, en appel, en 2013, acceptée à une condition: que l'homme fasse l'objet d'un arrêté d'expulsion vers le Liban. Une fois de plus, l'espoir d'être remis en liberté s'éloigne, le ministre de l'Intérieur de l'époque, Manuel Valls, ne prenant aucun arrêté en ce sens.
En 2022, le détenu se tourne alors vers une autre instance en demandant au tribunal administratif de faire ordonner son expulsion du sol français. Cette fois-ci, c'est la justice qui refuse, arguant qu'il n'est pas en mesure de donner un tel ordre au ministère de l'Intérieur.
Finalement, le 15 novembre 2024, le tribunal d'application des peines donne son feu vert après une nouvelle demande, reconnaissant une durée d'emprisonnement "disproportionnée au regard des faits commis et de sa dangerosité actuelle". Le Liban se dit, de son côté, prêt à l'accueillir après sa sortie de prison.
Tout semble rentrer dans l'ordre. C'était sans compter sur le parquet national antiterroriste, qui décide de faire appel de cette décision, avec pour argument que les Etats-Unis, parties civiles au procès de 1987, s'opposent toujours à sa libération.
"Symbole passé de la lutte palestinienne"
Dans les années 1980, Georges Ibrahim Abdallah était devenu l'ennemi public n°1. Pas à cause de son affaire, mais parce qu'on l'a longtemps cru, à tort, à l'origine de la vague d'attentats de 1985-86 dans laquelle 13 personnes sont mortes, dont sept au magasin Tati de la rue de Rennes à Paris. Des attentats qui avaient installé une psychose dans les rues de la capitale. Les véritables responsables, des pro-Iraniens, avaient été identifiés deux mois après la condamnation à la perpétuité de Georges Ibrahim Abdallah.
Aujourd'hui encore, l'homme bénéficie du soutien de manifestants qui se mobilisent régulièrement devant le centre pénitentiaire de Lannemezan (Pyrénées-Atlantiques), où il est emprisonné. Lundi soir, plusieurs dizaines de personnes se sont encore rassemblées pour demander sa libération, indique l'AFP.
Il peut aussi compter sur quelques soutiens à gauche de l'échiquier politique, à l'image du député Éric Coquerel qui, en février dernier, postait des photos depuis la cellule du détenu à Lannemezan. "Rencontre fraternelle entre militants politiques", écrivait-il dans cette publication.